Mille mercis,
Mrs.Krobb pour votre bienveillante critique.
Un mot toutefois pour
revenir sur votre commentaire concernant le fait que "l'ensemble
contribue encore à isoler et dramatiser les personnes malades mentales" :
La toute première ébauche de ce roman
devait évoquer uniquement le mouvement des entendeurs de voix,
mouvement d'origine anglo-saxonne qui replace les entendeurs dans la
singularité de leur expérience en les arrachant précisément aux
étiquettes d'ordinaire attachées à la maladie mentale (la schizophrénie
en particulier, qui ne concerne réellement que 7 à 8 % des entendeurs,
crois-je me rappeler).
Mais, répugnant finalement à écrire un récit
essentiellement monothématique, j'ai choisi de coupler cet univers à
celui des fantômes pour me diriger progressivement vers une double
lecture s'agissant de la déréalisation des deux figures du livre - le
fantôme et l'aliéné -, toutes deux prises de manière conjointe dans ce
processus implacable.
L'intention n'a donc jamais été de stigmatiser
davantage, en les enfermant dans certaines représentations, les "malades
mentaux", mais au contraire d'aborder l'expérience des voix selon
plusieurs autres angles : l'expérience singulière qu'elle est, ce dont
témoigne la partie sur le club des Entendeurs de voix, et le fait
central que "être au monde, c'est être possédé".
L'aliénation/possession
n'est donc pas le fait d'une dysfonction mentale, mais la qualité
première de l'existence. A cela j'ajoute cette hypothèse que les
manifestations dysfonctionnelles de type crise de folie, envoûtement,
possession, transe, etc., ne sont que l'exagération quantitative du mode
premier d'être au monde. C'est précisément à travers ces figures qu'il
nous est donné de voir la manière dont le réel s'empare de nous.
La
conclusion sur le fait que les voix qui agressent le personnage sont le
délire du monde passant à travers lui, fait notamment référence à la
lecture qu'ont fait G. Deleuze et F. Guattari du cas Schreber (Mémoires
d'un névropathe, Daniel-Paul Schreber), en opposition à la lecture qu'en
avait fait S. Freud dans "Le cas Schreber". J'ai d'ailleurs fait de
Schreber un des personnages de cette macabre sarabande sous le nom de
Schraber.
Voilà pour ces quelques explications que vous n'aurez pas trouvées, je l'espère, trop obscures.
Très respectueusement,
Manuel Candré Auteur
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