Les gros titres de Rolling Stone évoquaient un passage en hôpital psychiatrique durant sa jeunesse, et insinuaient qu'il s'était adonné à des pratiques sado-maso. L'histoire glauque de son corps en décomposition était étalée au premier plan, de même que ses sordides derniers jours à traîner de bar en bar. On a passé sous silence la spécificité de son écriture, ce qui l'avait momentanément rendu si étonnamment, si bizarrement populaire. (...) Ces articles défiguraient le Richard Brautigan que je connaissais, l'homme sensible (...) Il me manquait, l'auteur appliqué des meilleurs romans, celui qui retravaillait sans cesse sa prose, pour aboutir à cette clarté et cette simplicité qui lui tenait tant à coeur.Je n'ai jamais rien lu d'autre de lui que les extraits de ses livres que place Keith Abbott dans sa biographie, mais le personnage dépeint est très haut en couleur, bien humain et bien vivant, dans cette époque où tout semble assez psychédélique mais néanmoins beaucoup plus simple. On (re)découvre San Francisco des années 60-70, une ville propice aux écrivains de la génération beat, aux manifestations littéraires, aux envies débridées de faire ce que l'on veut. On sympathise avec des groupes de potes qui s'inspirent mutuellement pour leurs romans, qui tentent d'avoir une vie aussi rocambolesque qu'ils aimeraient la montrer dans leurs écrits. Et en dehors de ça, on se rend compte aussi des travers de la célébrité qui accable bon nombre de ceux qui y ont accès et de la difficulté de sortir des schémas imposés par la vie, par la société.
Malgré les aspects assez malheureux des débuts et de la fin de vie de Brautigan, on se prend d'amitié pour cet homme loufoque, attentionné, plein d'idées et complètement dépassé par les choses de la vie. Je dirai presque qu'on se sent d'attaque pour aller faire une bonne partie de pêche à la truite. En tout cas, c'est un récit très intéressant pour peu que vous soyez branchés contre-culture et littérature américaine de cette époque-là, et on retrouve un peu de ces incroyables aventures si propres à la petite bande de Burroughs, Ginsberg, Kerouac et compagnie.
par Mrs.Krobb
Brautigan, un rêveur à Babylone de Keith Abbott
Bibliographie américaine (traduction par Nicolas Richard)
Cambourakis, novembre 2014
10 euros
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