Nous sommes ici dans un récit de science-fiction dont la trame finira peut-être par être d'actualité d'ici 2070 - en tout cas, c'est sûrement l'avis de l'auteur - dans un Monde en pleine Apocalypse. Mais revenons un peu en arrière, disons une grosse dizaine d'années, au moment où l'Humanité est régentée par une Métastructure, un système virtuel colossal qui a pris les commandes afin de pouvoir régler les problèmes de l'Homme à sa place. Que ce soit au niveau médical (la plupart des hommes sont devenus androïdes, ou agrémentés d'organes augmentés), religieux (un nouvel ordre religieux qui vise à écraser tous ceux existants pour n'en former plus qu'un), politique ou économique, le pouvoir échappe complètement à l'Homme qui a créé la machine.
Mais voilà, la Métastructure finit par s’effondrer sur elle-même, dans un espèce de délire divin de vouloir devenir encore plus que le Maître incontesté de l'Homme : elle veut pouvoir recréer / devenir le Monde et refaire l'homme à son image, c'est-à-dire virtuel et "transparent", unifié. Donc, régler une fois pour toutes les problèmes d'identification qui agitent celui-ci et mettre tout le monde à la même enseigne culturelle, physique, psychique, spirituelle, etc... Elle déclenche alors une sorte de "virus" qui condamne le langage humain et électrique et qui fait mourir petit à petit l'humanité et les machines en les transformant en code pur. Un peu comme si on était réduit à son ADN ou à un langage binaire intraduit concrètement.
A partir de là, l'auteur commence à faire un parallèle entre l'Apocalypse biblique et celle qui prend place dans son récit, celui-ci prenant donc une très forte connotation pro-chrétienne. La réflexion s'avère intéressante si on arrive à bien la suivre - il faut certainement avoir déjà un peu de connaissances biblique ou philosophique. La Métastructure (ou disons son négatif, puisqu'elle n'existe plus), qui est donc l'Antéchrist, la Bête, le 666, devra affronter les pouvoirs de guérison miraculeuse (par la musique) de Gabriel (ou Link de Nova) qui va tenter de s'adapter à toutes les mutations et ainsi rétablir le langage et immuniser définitivement l'être humain et les machines. Pendant ce temps-là, le Vatican est mis à feu et à sang et sa Bibliothèque tente d'être sauvée en rejoignant les rebelles chrétiens à Grande Jonction.
C'est un livre dense, qui ressemble effectivement à "un western (musical) aux portes de l'infini" - avec des figurants hauts en couleur et complètement atypiques, des bandits intellectuels et des androïdes baptisés - et qui reprend bien les thématiques chères à l'auteur. Le style d'écriture n'est jamais égal d'un bout à l'autre et la lecture peut parfois sembler un peu laborieuse, mais on s'ennuie rarement et le rythme est bien soutenu - à vous faire parfois oublier qu'il fait près de 800 pages. Bien que les thématiques soulevées ne soient pas novatrices, elles n'en sont pas moins intéressantes et bien remises en question, avec un côté métaphysique assez développé. Et surtout, il y a peut-être une chance de survie pour la Beauté, grâce à l'Arche de Noé version 2.0.
par Mrs.Krobb
Grande Jonction de Maurice G. Dantec
Littérature française
Livre de poche, janvier 2008
8,50 euros
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