lundi 18 mai 2020

"Rosewater : Insurrection" - Tade Thompson

* * * Attention : ceci est le tome 2 d'une trilogie. Retrouvez le tome 1 ici * * *
Les extraterrestres ont récupéré des données dans l'atmosphère, grâce au réseau de cellules artificielles interconnectées, les xénoformes, qu'ils répandent sur toute la planète pour constituer un univers mental appelé xénosphère. Tout comme quelques rares personnes, je peux accéder à ces informations et c'est la raison pour laquelle j'ai été recruté par le S45. C'est un talent utile, surtout quand on recherche quelqu'un. Le champ extraterrestre est lié aux esprits des gens et les données peuvent circuler dans les deux sens parce que les xénoformes ne se connectent pas seulement entre elles. Elles s'accrochent aux récepteurs de la peau humaine et peuvent ainsi accéder au cerveau pour en extraire en douceur des renseignements.
Nous retrouvons Rosewater peu après les évènements du dernier livre. Cette fois-ci nous quittons un peu le point de vue de Karoo (un des derniers réceptifs survivant) pour suivre un peu plus sa compagne, Aminat, qui étudie la condition des humains fortement infectés par les cellules extraterrestres. Nous suivons également Jack Jacques, le président de Rosewater, et sa gestion de la ville, de nouvelles crises et de la demande d'indépendance. À côté de ça, une mystérieuse plante fait son apparition et sème la pagaille, tandis que la conscience d'une extraterrestre est transférée dans une humaine. Anthony, l'avatar de Armoise, l'entité extraterrestre, enquête de son côté.
Tout la cuisine est envahie de végétation. Le supplice lui est infligé par une sorte de vrille qui enserre les orteils de son pied gauche. Du sang coule, mais faiblement. La vrille se retire. Son pied droit... Il n'est pas certain de ce qu'il voit. Son pied droit a disparu, remplacé par un entrelacs de racines. Bewon n'a pas mal, mais il a l'impression qu'un liquide froid parcourt son corps. (...) du pollen remplit l'air et, en le respirant, il se sent de nouveau apaisé. Son environnement se remet à briller. Bewon sait qu'il est en train de mourir. (...) Puis Bewon se libère de son corps, en ayant terminé avec la vie et l'univers. Mais l'univers n'en a pas fini avec lui.
Ce tome se concentre beaucoup sur l'origine d'Armoise, de la plante extraterrestre qui lui est liée, sur cette civilisation ancienne désormais disparue dont la conscience demeure et qui a pour projet de se télécharger dans l'humanité. Il y a aussi tout un aspect politique très présent qui n'était pas dans le précédent tome, et tout un aspect sur la création de Rosewater, l'importance au niveau du pays. On est tout à fait dans une gestion collective à la fois du côté des extraterrestres et à la fois du côté humain : comment sauver sa peau, sa communauté.
« Tu me demandes de t'aider à exterminer mon espèce.
- Vous autres humains, vous êtes déjà très doués pour vous exterminer vous-mêmes. Rosewater est bombardée en ce moment même, et il s'agit seulement de l'un des trente-trois conflits qui ont lieu actuellement dans le monde. Dois-je parler du gaspillage des hydrocarbures ? De la contamination de l'eau ? Des déchets nucléaires ? Arrête-moi quand j'arriverai à un scénario apocalyptique qui te semblera suffisamment impressionnant. »
Là où le précédent livre alternait beaucoup entre les différentes époques, nous restons cette fois-ci en 2067, mais nous alternons en revanche entre les différents personnages. L'histoire est en direct, et on la suit de toutes parts. Il y a également une prédominance de personnages féminins dans ce tome, dont quelques-unes étaient déjà présentes dans le précédent, et qui sont vraiment bien écrits. Insurrection est vraiment dans l'action, la réaction, la stratégie... On découvre assez peu de nouvelles choses comparé à toutes les révélations du premier tome, mais il s'inscrit bien dans ce nouveau contexte. C'est à la fois un tome-pivot et un livre tout en action. On ne sait pas trop où on va, mais on commence à y aller franchement. En fait, cette trilogie semble avoir un peu la même structure que celle de Jeff Vandermeer.
La créature est principalement verte, mais certaines parties sont rouges, mauves et brunes, sans parler des fleurs, un vrai festival de couleurs. Du pollen voltige dans l'air, ce qui explique pourquoi Dahun m'a fourni un masque de protection. Un hallucinogène, peut-être ? Ou du poison ? De temps en temps, un organe projette ces particules. Pour le reste, le végétal semble assez placide. Je n'ai pas à attendre longtemps avant que la plante n'expulse une de ses créatures. Des racines et des tiges se tortillent avec vigueur, puis se séparent lentement pour former un orifice dans lequel apparaît un humanoïde, maintenu par des vrilles qu'il doit casser pour se dégager. Après cela, il s'envole en agitant ses ailes. Il ne ressemble pas à un animal et son vol ne trahit aucune hésitation.
Dans ce tome, un débat commence à vraiment prendre forme : sur le droit d'exister. Les extraterrestres ont-ils le droit de prendre la place de l'humanité pour continuer de vivre ? Les humains ont-ils le droit d'avoir la main mise sur d'autres humains ? Quid des réanimés, toujours vivants, mais "vides" de conscience ? Comment faire quand on est à moitié humain et à moitié alien ? Et que dire des mi-humains/mi-robots ? Ce tome aurait pu s'appeler aussi "Désintégration" : on ne sait pas si le dôme ne va pas finir par être détruit, si l'humanité va être remplacée, si les extraterrestres vont être rayés de la carte... Il y a aussi une réflexion sur les nouvelles technologies. En revanche, il est difficile de savoir sur quoi va vraiment porter le troisième tome. Un indice porte à croire qu'on reverra la Fille à la Bicyclette. Et peut-être qu'on finira par en savoir plus sur la station spatiale. À suivre !
Pour la plupart des Africains, la fracassante révélation qu'un extraterrestre avait atterri à Londres en météorite et grandissait sous la terre ne signifiait pas grand-chose. Cela ne perturba pas beaucoup nos existences. On colporta des théories conspirationnistes plus intéressantes, voilà tout. Mais le prix du bol de riz demeurait toujours trop élevé.
Bonus : extraits 1, 2, 3, 4
par Mrs.Krobb

Rosewater, t.2 : Insurrection de Tade Thompson
Littérature anglaise (traduction par Henry-Luc Planchat)
Nouveaux Millénaires, août 2019
21 euros

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